Nouveau DPE : deux fédérations, deux visions d’une réforme controversée

A l’image d’une profession très partagée au sujet du nouveau DPE, entre la FIDI et la CDI FNAIM, les deux principales fédérations de diagnostiqueurs, le fossé s’est encore creusé à l’occasion de la publication cette semaine de deux lettres ouvertes tirant un premier bilan de la réforme.
Le verre de la réforme du DPE est-il à moitié vide ou à moitié plein ? Deux visions s’affrontent actuellement au sein de la filière du diagnostic immobilier. Le sondage réalisé fin juin par DiagActu montrait qu’un diagnostiqueur sur deux (49%) s’estimait encore la veille de l’entrée en vigueur insuffisamment préparé en vue d’établir des nouveaux DPE. Deux lettres ouvertes publiées la semaine dernière consacre ce même écart de perception de la réforme par les deux principales fédérations représentatives des diagnostiqueurs, la FIDI et la CDI FNAIM.  
Si dans sa lettre ouverte aux professionnels de l’immobilier, aux propriétaires, vendeurs et bailleurs, la FIDI prend soin de rappeler qu’elle « est entièrement convaincue de l’utilité collective et sociétale de la réforme du DPE mise en place depuis le 1er juillet 2021 et de la pertinence des textes ciblant l’accélération de la rénovation énergétique des logements qui en font un pivot », elle ne cache rien cependant des difficultés actuelles de stabilisation du nouveau DPE. « Les estimations de consommations sont dans 80 % des cas surévaluées, quelques équipements de production d’ECS ou de chauffage ne sont pas encore prévus dans les calculs, et il n’est pas encore possible de réaliser des DPE à l’immeuble », liste ainsi la FIDI, en rappelant par ailleurs la formule de protection juridique qu’elle conseille aux diagnostiqueurs d’intégrer dans leurs rapports. 
La fédération fait aussi le point des dernières évolutions du dispositif depuis son entrée en vigueur. « Le moteur de calcul a été conçu sous l’autorité des pouvoirs public et le débogage de ce dernier s’est poursuivi ces jours-ci (un correctif sur les usages spécifiques de l’électricité a été réalisé le 12 juillet 2021 par l’administration), explique la fédération. Les éditeurs de logiciels « DPE V3 », qui ont dû travailler dans des conditions de délai extrêmes et très inconfortables, ont fourni tardivement des « versions de test ». Ils intègrent encore de nouvelles versions du moteur ».
Enfin, la FIDI attire l’attention des professionnels de l’immobilier sur l’opposabilité, « la nouveauté la plus importante » de ce « DPE V3 », et donc l‘obligation désormais de conserver et mettre à disposition des diagnostiqueurs les documents justificatifs provenant de professionnels. « Les diagnostiqueurs sont bien conscients de la difficulté de réunir certains documents, mais pour respecter cette nouvelle règlementation, il est indispensable que tous les professionnels et les propriétaires apportent les éléments dont ils ont connaissance afin de classer le bien au plus juste (étiquettes énergie et climat) ».
Le nouveau DPE cristallise les tensions entre les fédérations de diagnostiqueurs
Le ton est plus offensif pour la CDI FNAIM, par la voix de son président Thierry Marchand. Celui-ci reconnait que « le lancement de ce nouveau DPE est difficile et provisoirement inconfortable pour les diagnostiqueurs », et que « comme toute évolution, cette réforme ne peut se faire sans recul, avec une certaine inquiétude et la crainte de ne pas être à la hauteur ». Selon lui, « il y a encore beaucoup de travail à effectuer pour stabiliser ce dispositif, l’expliquer et l’accompagner seront notre quotidien dorénavant ». Mais Thierry Marchand insiste sur l’aspect provisoire de ces difficultés et, surtout, il tient à les relativiser. Il en veut pour preuve le nombre important de nouveaux DPE réalisés depuis le 1er juillet. « En 12 jours, plus de 27 000 DPE ont déjà̀ été réalisés, remarque-t-il. Avant l’application de ce nouveau dispositif nous réalisions 30 000 DPE par semaine. Ce résultat est la preuve de la réussite commune des éditeurs de logiciels et des diagnostiqueurs, compte tenu de la modification profonde de l’approche et du moteur de calcul, et cela malgré́ l’obstination de certains à torpiller maladroitement ce nouvel outil ». 
Le président de la CDI FNAIM pointe en effet « l’ erreur de perception » des autres fédérations sur cette réforme du DPE. « Ces derniers jours, certaines organisations professionnelles de notre filière se font le chantre de l’immobilisme, du scepticisme, suggérant finalement le peu de compétences des opérateurs, de leurs entreprises et leur incapacité à s’adapter au changement sur ce marché », regrette-t-il. 
« La difficulté́ majeure pour nos confrères réside dans le manque d’anticipation, qu’avec ce nouveau DPE nous avons changé d’Ere. De l’Ere du constat, nous intervenons aujourd’hui dans l’Ère de la preuve. Depuis 1996, notre jeune filière professionnelle a su faire face à de nombreux challenges en très peu de temps, sa rigueur et son dynamisme ne sont plus à démontrer. Elle reste forte pour défier les enjeux considérables à venir. L’archaïsme disparaitra naturellement, avec les jeunes générations qui nous suivront », conclu Thierry Marchand dans cette prise de position résolument offensive.
Entre les deux organisations professionnelles de diagnostiqueurs, le ton est en effet monté d’un cran depuis plusieurs semaines. Jamais encore leurs positions sur un dossier aussi essentiel pour la filière n’ont été à ce point éloignées, au moins sur la forme. Il n’est même plus question de sauver les apparences. La FIDI et la CDI FNAIM avaient déjà publiquement exprimé leurs désaccords à l’occasion d’un webinaire en présence de la DHUP, puis lors de la table ronde des RVDI le 8 juillet dernier. 
Ce nouveau DPE mal né se stabilise pourtant chaque jour davantage et, sous réserve que l’image de la profession n’ait pas été durablement écornée au cours de cette période confuse, l’entrée en vigueur chaotique de cette deuxième réforme pourrait finalement ne demeurer qu’un épiphénomène dans l’évolution de ce diagnostic depuis sa création en 2006.
Source: Diagactu du 20 Juillet 2021.

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